Comme beaucoup, j’ai toujours eu en tête l’idée de courir un marathon au moins une fois dans ma vie. Je ne savais pas quand, où, ni comment, mais je savais que ce moment finirait par arriver. Finalement, ce premier marathon s’est un peu imposé par hasard, au cours de ma préparation pour l’UT3P, un ultratrail en Normandie. Le fait de l’envisager comme une étape plutôt que comme un aboutissement m’a grandement aidé à l’aborder avec plus de sérénité.
Un marathon pas comme les autres
Ce marathon de 42 km n’a rien d’un marathon classique sur route. Il se distingue par quelques particularités qui pimentent sérieusement l’effort :
4600 marches
1200 mètres de dénivelé positif
Autant dire que ça change radicalement la donne.
Il s’agit du LHUT — Le Havre Urban Trail — une épreuve qui s’éloigne résolument des tracés plats et réguliers. Certaines portions techniques nous emmènent sur de petits sentiers boueux, étroits, parfois bien raides.
Heureusement, la diversité des paysages rend l’expérience particulièrement riche. Entre mer, falaises, parcs, forêts, patrimoine historique et passages en pleine ville, le parcours ne laisse aucune place à la monotonie.
Ma préparation pour un premier marathon
J’ai entamé ma préparation en course à pied dès le mois de décembre, dans l’optique de participer à l’ultratrail des Trois Ponts. Ce marathon, programmé pour le 25 mai 2025, s’est naturellement imposé comme une étape intermédiaire sur mon chemin.
La préparation ne s’est pas faite sans accroc. Deux longues pauses ont été nécessaires, la faute à des douleurs sciatiques qui m’ont freiné plus d’une fois.
Malgré cela, j’ai structuré mes séances autour de plusieurs axes : endurance fondamentale, fractionné, marche, et travail en dénivelé.
Avec un emploi du temps pro bien rempli, j’ai opté pour des séances courtes en semaine — entre 30 et 45 minutes — et des sorties plus longues le week-end, entre 1h30 et 2h30.
C’était aussi le bon moment pour tester mon matériel. Sur mes sorties longues, j’ai intégré des gels énergétiques pour habituer mon corps à les assimiler. J’ai également pris l’habitude de m’hydrater régulièrement, soit avec mon Camelbak, soit avec de petites flasques logées dans ma ceinture.
Le jour J, j’ai misé sur la légèreté : une ceinture, deux flasques (l’une d’elles légèrement salée), et quatre gels bien répartis pour tenir la distance.
42 km d'aventure
Avant de me rendre sur la ligne de départ, je me suis équipé de :
- Chaussures de running (Asics gel stratus 4)
- Chaussettes (Nike)
- Short court
- Débardeur
- Ceinture (Kiprun)
- GoPro
- 2 Flasques de 250 ml (Kiprun)
- 4 Gels de 32 g (Decathlon)
- Téléphone
- Clefs
Un début rafraichissant
Le départ de la course est prévu à 9h20. Je me lève vers 7h45, histoire de me réveiller tranquillement. Après un petit-déjeuner composé d’un kiwi, d’un avocat, de pain avec du beurre de cacahuète, et d’un thé, je fais quelques exercices de mobilité pour détendre mes muscles.
À 8h50, je pars de chez moi sous la pluie pour m’échauffer un peu avant d’arriver sur la ligne de départ. Une fois sur place, je me positionne en première ligne — l’occasion d’être premier au moins une fois dans la course. 😂
Me voilà prêt à prendre le départ de mon tout premier marathon, le LHUT (Le Havre Urban Trail), et la pluie redouble d’intensité. Je n’ai pas prévu de veste et commence à avoir un peu froid. J’espère que le départ ne tardera pas trop.
Une fois le décompte terminé, tout le monde s’élance. Je tente de me frayer un chemin pour prendre la tête, mais les quatre premiers forment une ligne compacte devant moi. Impossible de passer.
Après 200 mètres, je renonce à cette idée et ralentis un peu pour mieux anticiper la suite.
En arrivant au bord de la plage, les rafales de vent s’ajoutent à la pluie. Je décide alors de me caler derrière un autre coureur pour limiter la prise au vent.
Les 7 à 8 premiers kilomètres se déroulent sur terrain plat, dans des conditions météo toujours très agitées. Je cours à une allure moyenne de 4’15 à 4’20 au kilomètre.
Les premières montées, les premiers rayon de soleil
Les premières montées arrivent, et je me sens encore bien. Ma tête a envie de pousser fort, mais je reste sur un effort modéré, de peur d’exploser en chemin. Pendant que l’on grimpe, la pluie cesse enfin, et les premiers rayons de soleil percent les nuages.
Mon débardeur semble avoir triplé de poids avec toute l’eau absorbée, mais je sais qu’il finira par sécher rapidement.
Au 10e kilomètre, je passe en environ 43 minutes. Je commence à me demander si je ne suis pas parti un peu trop vite. Mais comme je me sens bien, je ne ralentis pas vraiment.
La première descente d’escaliers arrive, et là, je commence à vraiment m’amuser. Les descentes, que ce soit sur route ou sur marches, c’est mon terrain.
Je dévale les marches par trois ou quatre, dépasse quatre ou cinq coureurs, puis profite de l’élan de la descente pour me projeter dans la montée suivante et relancer l’allure.
Je poursuis sur ma lancée et me sens toujours en forme. J’avale mon premier gel énergétique à l’approche de la première heure de course. Mentalement, tout va bien, et je commence à croire que l’objectif des 4h00 est atteignable.
À partir du 12e ou 13e kilomètre, je commence à rattraper de nombreux coureurs du semi-marathon, partis 1h20 avant nous.
C’est parfois un peu gênant, je me retrouve bloqué à certains endroits, mais ça met un peu d’ambiance et c’est agréable de croiser du monde.
Déjà la moitié ?
Je m’approche du semi-marathon, et étonnamment, je me sens toujours bien. D’habitude, sur mes sorties longues de 20 à 24 km, je terminais dans un état de fatigue avancée. Mais là, à ce moment de la course, ça va encore.
Certes, une légère fatigue générale commence à s’installer, mais aucune douleur particulière à signaler.
Quand j’atteins les 21 km à ma montre, je suis autour d’1h40. Officiellement, je passe le semi (à 22 km sur ma montre) en 1h43. Plutôt satisfait, je me dis qu’il me reste environ 2h15 pour boucler la deuxième moitié.
Même si je sais qu’elle sera plus difficile, avec plus de dénivelé et de marches, je pense avoir pris suffisamment d’avance.
Je repars donc confiant pour attaquer cette seconde moitié de mon premier marathon — sans même m’arrêter au ravitaillement.
Les parties techniques, c'est ludique
Le semi est derrière moi. Et c’est là que tout se complique.
Les sentiers forestiers, trempés par la pluie matinale, sont devenus de véritables pièges. Glissants, instables, boueux… À chaque virage serré ou dans chaque descente, je frôle la chute. Je trébuche, je glisse, mais je tiens bon.
Une seule idée en tête : passer sous les 4 heures. Qu’importe les risques, je ne lâcherai rien.
Dans ces portions techniques, la concentration est maximale. Le moindre faux pas, et c’est la gamelle. Les racines, les pierres, les troncs en travers du chemin, les flaques profondes… chaque foulée doit être réfléchie.
Ma cadence se transforme : un coup je saute, un coup je piétine, je marche, j’enjambe, je m’appuie sur un arbre… parfois je me mets carrément à quatre pattes pour grimper un passage. Là, je laisse mon instinct animal prendre le relais.
Ce genre de terrain, ça casse la monotonie d’un marathon classique. Et franchement, je trouve ça bien plus fun. Mais il faut le dire : c’est aussi bien plus exigeant.
Vers le 30e kilomètre, la fatigue commence vraiment à s’installer. Les jambes sont lourdes, très lourdes.
Mais je reste lucide : je suis encore dans le bon tempo. Hors de question de m’arrêter maintenant.
Les marches pour la fin, que du plaisir
Il reste “seulement” 11 ou 12 km, et je me dis que le plus dur est derrière moi, qu’il ne me reste plus qu’à serrer les dents.
Malgré tout, c’est la portion la plus difficile du marathon, car c’est ici que se trouvent les fameux “murs” de marches à franchir.
Je connais un peu la zone pour y avoir fait quelques reconnaissances en amont. La différence, c’est que pendant les entraînements… je n’avais pas déjà 30 km dans les jambes. 😅
Les premières grosses montées de marches arrivent, et j’ai du mal à grimper deux par deux — même en marchant.
Pendant mes reconnaissances, je montais en courant. Là, mes cuisses commencent sérieusement à souffrir. Rapidement, je me résigne à monter marche par marche. Impossible de faire autrement.
J’ai la bouche sèche, je perds un peu en lucidité, j’ai chaud… mais il est hors de question que je m’arrête.
Je relance comme je peux sur les portions plates ou en descente. Je me force à courir en petites foulées dans certaines montées, mais dès qu’un mur de marches surgit, c’est terminé : je monte au ralenti.
Mon cerveau est complètement déconnecté. Mon seul objectif : mettre un pied devant l’autre.
Je jette un œil à ma montre de temps en temps, pour me motiver et vérifier si je suis encore dans les temps.
J’ignore la douleur, je serre les dents, et je continue d’avancer.
Bilan de mon premier marathon
Je termine finalement en 3 heures, 49 minutes et 45 secondes. 18e sur 475 participants.
Une fois la ligne franchie, j’ai la tête qui tourne un peu, sûrement à cause du manque d’alimentation. Je n’ai pas bu beaucoup d’eau et je n’ai pris que 4 gels et un petit bout de banane pendant toute la course. J’ai l’impression d’être affamé, alors je remplis mon assiette au ravitaillement… mais après quelques bouchées, je n’arrive déjà plus à rien avaler.
Assis depuis 10 minutes, une douleur intense se déclenche, partant du haut des cuisses jusqu’au bout des pieds. C’est une sensation que je n’ai jamais ressentie : mes jambes semblent encore en train de souffrir, alors que je suis pourtant au repos.
Je me lève difficilement, je marche en boitant pendant près d’une heure. Puis la douleur s’atténue, laissant place à de simples crampes et courbatures.
Finalement, je suis assez content de ma prestation.
J’ai un petit regret sur les 10 derniers kilomètres que je n’ai pas réussi à bien gérer. Je perds 5 places sur cette portion. Mais pour un premier marathon, le contrat est rempli.
D’un côté, je n’ai plus envie de revivre une course aussi dure… mais de l’autre, je sens que je pourrais faire mieux.
Maintenant, place à la préparation de l’ultratrail : il me reste 4 mois pour travailler la distance.